mercredi 14 août 2019

Très important document de la rapporteuse de l'ONU sur les personnes handicapées sous tutelle



_A toutes les personnes ayant un proche en situation de handicap sous tutelle ou curatelle .


_ Si vous avez l'occasion d'écrire au Juge des Tutelles concernant une personne en situation de handicap sous tutelle , je vous recommande vivement de joindre à votre courrier cet extrait de la rapporteuse de l'ONU sur les droits des personnes handicapées sous tutelle .






En France, un très grand nombre de personnes handicapées se voient retirer ou restreindre leur capacité juridique. D’après les données du Ministère de la Justice, il y avait en 2015 quelque 385,000 personnes handicapées mises sous tutelle et 360,000 sous curatelle. Les individus placés sous tutelle ne sont plus en
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capacité d’exercer leurs droits et nécessitent d'être représentés par le tuteur pour accomplir les actes de la vie civile. Les personnes sous curatelle conservent la capacité d’exercer la plupart de leurs droits mais nécessitent l’assistance ou l’autorisation d’un tiers pour accomplir certains actes civils. Si les principes juridiques de nécessité, subsidiarité et proportionnalité régissent en théorie le recours à ces mesures, on m’informe que les personnes handicapées, notamment les personnes autistes ou celles avec handicap intellectuel et psychosocial, sont placées sous tutelle ou curatelle de façon systématique afin, notamment, de faciliter les procédures d’accès aux prestations sociales ou le placement en institution.
Il est important de souligner que le cadre juridique français pour la protection des majeurs, réformé par la Loi no 2007 308 du 5 mars 2007, envisage d’autres mesures moins restrictives telles que la sauvegarde de justice, le mandat de protection future, la mesure d’accompagnement social personnalisé, et la mesure d’accompagnement judiciaire. Bien que ces mesures de protection constituent une alternative à la mise sous tutelle ou curatelle, et soutiennent les personnes handicapées dans l’exercice de leur capacité juridique, on m’informe qu’elles sont peu utilisées en raison du manque de formation et de sensibilisation chez les juges, les avocats, les familles et la population en général.
J’aimerais rappeler que l’égalité de reconnaissance s’agissant de la capacité juridique des personnes handicapées constitue une obligation fondamentale au titre de l'article 12 de la Convention relative aux Droits des Personnes Handicapées, qui reconnaît d’une part leur statut de détenteurs de droits et d’autre part leur capacité à agir conformément au droit. En réalité, loin d'assurer leur protection, la mise sous tutelle prive les personnes de leurs droits et entraîne un risque d'abus et d'institutionnalisation. J’exhorte la France à revoir sa législation afin d'éliminer tout régime de prise de décision au nom d’autrui. A la place, toutes les personnes handicapées doivent pouvoir bénéficier d’une prise de décision accompagnée, quel que soit le degré d'accompagnement nécessaire, afin qu'elles puissent décider par elles-mêmes, en toute connaissance de cause.


Privation de liberté et traitement sans consentement
Le droit français permet l’hospitalisation et le traitement sans consentement des personnes avec handicap psychosocial. Le Code de Santé Publique, modifié par la Loi No 2011-803 du 5 juillet 2011, régit les conditions et procédures relatives aux soins psychiatriques sans consentement, que ce soit en ambulatoire ou sous forme d’hospitalisation complète ou partielle, à la demande d’un tiers ou d’un représentant de l'Etat. Le juge des libertés et de la détention doit statuer sur la nécessité de maintenir toute mesure d'hospitalisation complète avant l'expiration d’un délai de douze jours après admission.
Au cours de ma visite, il m’a été rapporté que de nombreuses personnes autistes ou des personnes avec handicap psychosocial font l’objet de soins psychiatriques sans consentement. Il semble également que les occasions de s’opposer à leur hospitalisation soient limitées. En effet, les juges se fient principalement à l'avis des médecins et les personnes handicapées redoutent de rencontrer le juge, n’étant pas suffisamment informées du but de l’entrevue. De ce fait, de nombreuses personnes handicapées demeurent

en hôpital psychiatrique pendant de longues périodes. L’absence d’accompagnement de proximité fait que certaines d’entre elles sont, par la suite, placées en établissements de long séjour, où elles finiront leurs vies.
De surcroît, j'ai reçu de graves allégations d’abus et de traitements dégradants à l’encontre de personnes handicapées faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement. On m'a, notamment, signalé des cas d’abus sexuels et psychologiques, le recours à l'isolement et à la contention, la pratique du "packing" pour les personnes autistes et des menaces d’hospitalisation sans consentement émanant du personnel soignant. A titre d'exemple, des personnes recevant un traitement psychiatrique en ambulatoire rapportent l’imposition de couvre-feux et la restriction de leur mobilité sous peine d'hospitalisation forcée. Pourtant, les traitements sans consentement en ambulatoire ne font pas l'objet d'un contrôle judiciaire.
Dans ce contexte, je salue les initiatives portées à ma connaissance notamment le programme " Un chez-soi d'abord ", qui fournit des solutions de logement et d’accompagnement individualisées aux personnes avec handicap psychosocial, ainsi qu’une maison de répit accueillant le même public à Marseille. J’engage le Gouvernement à renforcer son soutien et permettre la montée en puissance de ces initiatives, ainsi que d’autres solutions alternatives de proximité, qui respectent les droits et la dignité des personnes handicapées conformément à la CDPH. De plus, j’exhorte la France à revoir son cadre juridique relatif aux soins psychiatriques sans consentement de façon que toute intervention thérapeutique soit fondée sur un consentement libre et éclairé.


Pour lire le document complet https://www.justiciablesencolere.com/2018/03/21/les-droits-des-personnes-hnadicapées/


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